La justice irakienne risque de canoniser Saddam

Publié le par Adriana Evangelizt

Excellent article de Ria Novosti qui montre bien la farce sinistre du jugement de Saddam Hussein par des juges qui ne sont que des marionnettes agissant pour l'occupant américain qui a fait certainement plus de morts, de victimes et causé davantage de dégats que le raïs déchu. Les plus grands criminels de guerre qui agissent dans notre monde actuel continuent leurs exactions en toute impunité et personne ne les condamne. Le monde à l'envers.

 

 

 

 

La justice irakienne risque de canoniser Saddam

Par Vladimir Simonov

RIA Novosti

 

Un deuxième procès contre Saddam Hussein s'est ouvert à Bagdad, et on ne peut que s'étonner face au manque de perspicacité dont fait preuve la justice irakienne. En effet, l'ex-dictateur semble se déplacer lentement du banc des accusés vers le piédestal d'où il a été délogé, croyait-on, par les forces de coalition avec les Etats-Unis à la tête.

Le premier procès examinait l'affaire dite de Doujaïl, du nom d'un village où le gouvernement baasiste a massacré 148 chiites après un attentat contre Saddam Hussein. Au nombre des victimes évoquées pendant les longs mois qu'a duré le procès, on peut ajouter encore trois cadavres: les avocats qui défendaient l'ex-président et son entourage ont été méthodiquement éliminés durant les pauses qui ponctuaient les audiences. La tactique utilisée par les forces soutenant l'accusation a paru menaçante même au président du tribunal au point qu'il a accusé le gouvernement d'ingérence dans le procès et a déposé sa démission. Le verdict sur l'affaire Doujaïl, qui sera rendu le 16 octobre prochain, le sera par un autre juge.

Et ce n'est qu'une touche, sanglante certes, dans le tableau général d'inefficacité et de partialité du système judiciaire irakien laissé par le premier procès de Saddam Hussein. "Aucun des juges ne connaissait la loi pénale internationale, et le déroulement du procès revêtait un caractère chaotique et arbitraire, ce qui rendait impossible de garantir l'équité", a constaté dans une déclaration spéciale l'organisation non gouvernementale chargée de la défense des droits de l'homme Human Rights Watch.

Il ne s'agit pas, bien sûr, des particularités juridiques, dont la mobilisation massive de témoins à charge anonymes: peut-on, en effet, contester le témoignage d'une personne sans nom et sans adresse? Tout simplement, le procès a reflété avec précision la situation des structures étatiques et des institutions démocratiques de l'Irak en général, telles qu'elles sont apparues après trois ans d'occupation américaine, état qui ne révèle rien d'autre que le chaos et le trompe-l'oeil absolus.

Une guerre civile non reconnue se poursuit en Irak où près de 2.000 engins explosifs artisanaux explosent tous les mois. Le conflit israélo-libanais apparaît comme un simple échange de tirs dans un bar par rapport à l'Irak où le nombre des victimes est incomparablement plus grand. Naturellement, dans ces conditions aggravées par l'impuissance du gouvernement irakien et le refus du président George W. Bush de mettre en péril les vies des soldats américains à la veille des élections législatives de novembre prochain, la sécurité en Irak devient illusoire, voire irréalisable.

Dans ce contexte, le procès de Saddam Hussein ne peut que se transformer en farce. Des ronds-de-cuir, que la population considère comme des marionnettes des forces d'occupation, essaient de diriger le procès, et un coup de feu dans le dos d'un avocat semble une simple forme de compétition judiciaire.

Après tout, l'ampleur des crimes commis par Saddam Hussein nécessite un procès non moins solide et compétent susceptible de briser le mythe qui entoure cette personnalité que le monde arabe continue de vénérer comme un héros national, voire comme une icône.

Le deuxième procès semble présenter infiniment plus d'opportunités que le premier. Il examinera l'opération Anfal ("butin de guerre", en arabe) quand, en 1987-1988, les baasistes dirigés par Saddam Hussein ont éliminé près de 100.000 Kurdes que le dictateur irakien soupçonnait d'entretenir des liens avec son ennemi juré, l'Iran. C'est pendant l'opération Anfal que le cousin de Saddam Hussein, Ali Hassan Al-Majid, a reçu le sinistre surnom d'"Ali le chimique". Les témoins survivants assurent avoir été exposés à une attaque aux gaz toxiques, argument suffisant pour qualifier les événements de génocide.

Toutefois, on a tout lieu de penser que Saddam Hussein parviendra à nouveau à faire du banc des accusés une tribune pour communiquer avec son unique témoin, la caméra de télévision, et via la caméra avec le peuple irakien et, plus généralement, le monde arabe.

On peut prédire avec certitude ce qu'il dira. L'ex-président mettra en question la légitimité du tribunal composé de personnalités approuvées par les forces d'occupation et agissant dans les conditions de l'occupation étrangère. Il jettera l'anathème sur l'incursion américaine réalisée en 2003 contre un pays indépendant sous un faux prétexte concernant les armes de destruction massive et contre la volonté de l'ONU. Il appellera aussi ses partisans à poursuivre la lutte contre la présence des troupes américaines en Irak.

Autant d'arguments difficiles à parer et qui tomberont dans un sol fertile creusé par les explosions et engraissé par le sang. Intimidée par la guerre civile, la carence d'autorité et l'anarchie totale, la population irakienne est incapable de comprendre pourquoi on l'a libérée du dictateur pour la plonger dans un état d'horreur méconnu sous Saddam Hussein.

La justice irakienne risque de "canoniser" son principal accusé. L'ex-dictateur pourrait monter à l'échafaud avec sur sa tête une couronne d'épines.

Sources : RIA NOVOSTI

Posté par Adriana Evangelizt

Publié dans IRAK

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