L'UNION EUROPEENNE ASSERVIE AUX USA

Publié le par Saint-Graal

Lire c'est s'instruire, encore faut-il ne pas prendre n'importe quoi comme doc sinon on tombe dans la désinformation complète comme se plaisent à le faire certains saboteurs de la France... parce qu'il y en a certains qui vivent en France pour profiter des avantages que n'ont pas certains pays mais qui néanmoins le critiquent à qui mieux-mieux et s'en donne à coeur joie de dire que notre pays est pro-arabe, par exemple... ils vivent en France mais en fait, leur coeur bat pour un autre pays et même chez nous, ils poursuivent une politique de déstabilisation dans le seul but de nous vendre et de nous asservir et à leur pays et aux Etats-Unis... et ils sont en train de mener la France tout droit dans le mur. Nous, nous nous sentons bien Français, nos aïeuls ne se sont pas sacrifiés en vain en 1789 et c'est pour la France que nous nous battons et que nous nous battrons aussi s'il faut prendre les armes... quant à ceux qui critiquent notre pays... qu'ils aillent donc aux USA ou ailleurs et qu'ils nous laissent vivre en paix...

 

L'UNION EUROPEENNE MALADE DE L'ATLANTISME

 

Par Bernard CASSEN

 

Divisée sur la guerre en Irak, l’Union européenne pourrait toutefois en retirer un « avantage collatéral » : celui d’affirmer une identité propre en prenant ses distances avec un « partenaire » américain qui confond alliance et allégeance. Mais il faudrait, pour cela, donner un contenu politique à l’euro, remettre en cause le tout-marché et promouvoir le savoir-faire européen en matière de droit et de justice.

 Au moment où ils se retrouvent à Athènes, le 16 avril 2003, pour signer le traité d’adhésion, les représentants des dix nouveaux pays membres (1) de l’Union européenne (UE) et ceux des quinze actuels sont loin d’être tout entiers saisis par l’émotion de cet instant de retrouvailles historiques et géographiques. Si les Etats-Unis ne sont pas physiquement présents, leur ombre portée depuis Washington et Bagdad rend quelque peu surréalistes les proclamations obligées d’unité de chefs d’Etat et de gouvernement prétendant soutenir les efforts des Nations unies « pour garantir la légitimité internationale et la responsabilité mondiale ». Cette « légitimité internationale » n’est-elle pas, brutalement, et au même moment, tournée en dérision en Irak par quelques-uns des participants, M. Anthony Blair et M. José Maria Aznar en tête, soutenus par la majorité des autres réunis pour la « photo de famille » devant l’Acropole ?

Déjà, en décembre 2002 à Copenhague, lors de l’adoption du traité par le Conseil européen, chacun avait bien compris que, paradoxalement, cette Europe à vingt-cinq serait encore moins porteuse d’une volonté européenne autonome qu’auparavant (2). L’agression anglo-américaine a donné un formidable coup de projecteur sur cette vassalisation - désirée ou résignée, selon les cas -, qui était seulement implicite dans les discours officiels. C’est pourquoi l’effet d’annonce psychologique de l’élargissement aux pays d’Europe centrale et orientale a été nul, les citoyens étant bien conscients que les choses importantes se passaient ailleurs. Avant même de tenter de régler ses problèmes internes, et ils sont légion, l’Union est ainsi confrontée à sa question existentielle jamais sérieusement posée depuis de Gaulle : celle du « lien transatlantique ».

Pour qu’il y ait « lien », encore faudrait-il qu’existe à chaque extrémité une entité décidée à le valoriser et à ne pas le considérer comme une simple courroie de transmission de la rive ouest de l’Atlantique à l’autre. En fait, il n’y a d’atlantistes que sur celle-ci. Car, dans leur grande majorité, les élites politiques, intellectuelles et médiatiques, et pas seulement en France, sont à ce point acquises par avance, et depuis des décennies, au « parti américain » (Régis Debray) qu’elles refusent de regarder la réalité en face : la morgue impériale ne connaît qu’un centre - les Etats-Unis - et ne laisse place à aucune codécision avec quelque autre élément de la périphérie « globale » que ce soit, pas plus l’Europe que la Russie. Et cela ne date pas de M. George W. Bush : M. James Carter et M. William Clinton étaient eux aussi, en leur temps, des unilatéralistes chaque fois que de besoin (3).

On sait bien que les élans du coeur sont aveugles, et c’est heureux pour les atlantistes. Car s’ils se donnaient seulement la peine de lire la presse et les publications officielles américaines, ils sombreraient dans le plus profond dépit amoureux : à Washington, on a autant de considération pour l’Espagne de M. José Maria Aznar et l’Italie de M. Silvio Berlusconi que pour le royaume de Tonga et les îles Salomon, tous membres, sur un pied d’égalité, de la fameuse « coalition ». On ne peut qu’éprouver de la gêne devant la photo prise lors du sommet Aznar-Blair-Bush des Açores en mars 2003, où le président des Etats-Unis, avantagé par sa taille, tapote négligemment l’épaule du président du gouvernement espagnol, comme il le ferait avec son animal de compagnie...

Quant au Royaume-Uni, dont les dirigeants se sont traditionnellement prévalus de leur « relation spéciale » avec les Etats-Unis, M. Zbigniew Brzezinski, conseiller à la sécurité nationale du président Carter (1977-1981) et toujours influent dans les cercles du pouvoir, lui avait depuis longtemps dit son fait, à savoir que cette relation n’existait que dans sa tête : « Les liens d’amitié doivent être entretenus avec ce soutien crucial de l’Amérique, allié loyal, base militaire vitale et proche collaborateur pour les questions de renseignement. Mais rien dans sa politique ne réclame une attention soutenue. Acteur géostratégique à la retraite, la Grande-Bretagne se repose sur ses lauriers illustres, à distance respectable de la grande aventure européenne menée par la France et l’Allemagne (4). » Et le secrétaire à la défense, M. Donald Rumsfeld, ne disait pas autre chose lorsqu’il se déclarait prêt à envahir l’Irak en se passant de la quantité négligeable que constituait pour lui le corps expéditionnaire britannique. On dit que M. Blair aurait été profondément affecté par ce dur rappel au principe de réalité...

Pour constater la permanence, dans les deux dernières décennies, de la politique de Washington à l’égard de l’Europe - même si elle prend une tonalité à la limite de l’hystérie chez les « faucons » -, quelques rapides lectures suffiront. D’abord le document de 1992 du Pentagone, Defense Policy Guidance 1992-1994, où il est dit, sans prendre de gants, que les Etats-Unis décourageront « les pays industrialisés avancés de toute tentative visant à défier [leur] leadership » et ne toléreront pas « l’émergence future de tout concurrent global (5)  », formules qui ressemblent fort à un portrait-robot de l’Union européenne. Ensuite, le document intitulé National Security Strategy, rendu public par la Maison Blanche en septembre 2002. C’est dans ce texte fondateur qu’est pour la première fois légitimée la guerre préventive. Ce que l’on a moins remarqué, c’est que pas une seule fois il n’y est fait référence à l’Union européenne en tant que telle, pas plus qu’à l’un quelconque de ses Etats membres. La Russie, la Chine, l’Inde, en revanche, ont droit à de longs développements ; et des pays réputés amis, comme l’Australie, la Corée du Sud, le Mexique, le Brésil, le Canada, le Chili et la Colombie font l’objet de mentions brèves, mais élogieuses. Les « alliés européens », sans autre précision, sont invoqués deux ou trois fois, le mot « Europe », lui, étant utilisé une seule fois, et de manière significative : « L’Amérique aura besoin de bases et de cantonnements en Europe occidentale, en Asie du Nord-Est et bien au-delà. »

François Mauriac aimait tellement l’Allemagne qu’il se félicitait qu’il y en ait deux, à son époque : la RFA et la RDA. M. Rumsfeld identifie lui aussi deux Europes : celle qu’il méprise, la « vieille », insuffisamment docile aux diktats de Washington ; et celle qu’il aime, la « jeune », autrefois satellite de Moscou, et qui, elle, a effectivement « l’Amérique dans la tête ». M. Bush va encore plus loin, dans sa réponse à une question du ministre turc des affaires étrangères : « Y a-t-il encore une Union européenne ? Je l’ai cassée en trois ! (6)  »

On pourrait penser que, face à de telles gracieusetés, un sursaut de realpolitik imposerait aux dirigeants européens de renoncer à courir derrière un « partenaire » qui se dérobe et de se prendre eux-mêmes en main. Ce n’est pas le cas. En France, le « patron des patrons », le baron Ernest-Antoine Seillière, a désavoué son propre gouvernement, qui applique pourtant par ailleurs sa politique, en adjurant ses amis américains d’envoyer des télégrammes de protestation aux consulats de son pays, mais surtout à ne pas s’en prendre aux produits français. Chez les politiques, le choeur des pleureuses atlantistes - de M. Pierre Lellouche à M. Alain Madelin, en passant par M. Bernard Kouchner - a repris du souffle, au motif que, après la victoire militaire anglo-américaine en Irak, la France et l’Allemagne se retrouveraient dans le camp des « perdants ».

 

Réévaluer les rapports de forces

 

Comme si l’histoire s’arrêtait à la prise de Bagdad. Comme si le viol manifeste et revendiqué de la légalité internationale par un grand pays doté d’institutions démocratiques n’était pas un prix exorbitant à payer pour la chute d’une dictature honnie (objectif qui, au passage, ne figurait pas dans la résolution 1441, base invoquée pour l’agression). Comme si, enfin, un totalitarisme pouvait être cautionné par la défaite d’un autre. Car, comme l’écrit William Pfaff dans l’International Herald Tribune, « les néoconservateurs sont des fanatiques. Ils pensent qu’il est loisible de tuer des gens pour des idées non prouvées. La morale traditionnelle dit que la guerre se justifie en cas de légitime défense. La morale totalitaire justifie la guerre pour rendre les sociétés et les gens meilleurs (7)  ».

Au plan européen, la mise en pièces de la légalité internationale devrait être ressentie comme attentatoire aux valeurs fondamentales de l’Union, entité de droit par excellence, où, par exemple, des intérêts nationaux divergents acceptent de se plier à des procédures de décision comme celle de la majorité qualifiée ou à des arrêts sans appel de la Cour de justice de Luxembourg. Cet assaut frontal ne semble pas émouvoir des gouvernements n’aspirant qu’à « recoller les morceaux » avec le suzerain américain en sollicitant humblement sa clémence.

Cette attitude capitularde témoigne d’une très mauvaise évaluation du rapport de forces. A terme, c’est moins l’Europe qui aura besoin des Etats-Unis que l’inverse, ce que ne se font pas faute de relever de nombreux commentateurs américains. Une situation économique et financière préoccupante, qui pourrait menacer la réélection de M. Bush (8) ; des coûts de « reconstruction » de l’Irak tellement astronomiques qu’ils nécessiteront les concours financiers massifs de l’Union européenne et des institutions multilatérales où, pays membres cumulés, cette dernière dispose potentiellement d’un droit de veto ; des difficultés politiques inévitables, peut-être des bouleversements en Irak et dans les pays voisins, etc. : au lieu de faire des génuflexions pour obtenir quelques miettes des budgets de l’USAID, les gouvernements de l’UE devraient se contenter d’apporter une aide humanitaire aux malheureuses populations irakiennes, sans pour autant cautionner l’agression. Et attendre. Attendre quoi ? Que les Etats-Unis, lorsqu’ils se trouveront dans l’impasse politique d’une occupation dont, par ailleurs, les coûts ne pourront pas être couverts par un pétrole irakien sur lequel la IVe convention de Genève leur interdit de mettre la main, demandent eux-mêmes que l’ONU revienne dans le jeu par la grande porte, et pas seulement comme brancardière. Comme le dit M. Philippe Séguin, « les demandeurs d’aujourd’hui ne sont pas forcément ceux de demain (9)  ».

Attendre, mais agir également dans un domaine où l’Union « sait faire » : le droit. Par exemple en saisissant la Cour de justice internationale de La Haye pour que soient fixés le statut de l’équipée anglo-américaine - guerre « juste » ou pas ? - et celui du proconsulat du Pentagone en Irak. Ce point est de la plus haute importance pour l’éventuel déblocage ultérieur de fonds communautaires qui, en toute hypothèse, ne devraient pas être utilisés pour réparer les dégâts des bombardements, les casseurs anglo-américains devant être les seuls payeurs. Egalement en rappelant sans cesse, en premier lieu à M. Blair, les obligations des puissances occupantes telles que définies par la convention IV de La Haye de 1907 et de la IVe convention de Genève. En n’oubliant pas non plus que le Royaume-Uni et l’Espagne, qui, contrairement aux Etats-Unis, ont accepté la compétence de la Cour pénale internationale, pourraient bien être traduits devant elle...

Plus généralement, en exigeant le paiement par les Etats-Unis, sous forme de droits de douane renforcés, des 4 milliards de dollars de compensations auxquels ils ont été condamnés par l’organe de règlement des différends de l’OMC pour l’utilisation de paradis fiscaux par leurs multinationales. En explorant l’idée, qui panique Washington, du paiement du pétrole aux producteurs en euros et non plus en dollars, ce qui aurait pour effet immédiat de saper le statut de monnaie de réserve du billet vert, fondement de la capacité des Etats-Unis à vivre aux crochets de la planète. Les idées ne manquent pas pour rééquilibrer les rapports entre l’Europe et les Etats-Unis et remettre un peu de plomb dans la tête des « faucons ». C’est la volonté politique qui fait totalement défaut aux responsables, au risque de réduire l’Union à une coquille vide de toute signification en termes de communauté de destin avec ses intérêts propres, et de dissuader définitivement la majorité des citoyens de s’y intéresser.

Cette attitude d’« apaisement » est totalement en porte-à-faux avec la naissance d’un véritable espace public européen se constituant dans l’opposition aux politiques de Washington : l’Europe européenne est bien en gestation sur le terrain, mais pas chez la majorité des dirigeants. Les massacres de civils et les meurtres de journalistes en Irak ; l’arrogant étalage de la puissance ; le gaspillage indécent de ressources refusées à la lutte contre le sida ou le paludisme (un mois de guerre en Irak a coûté plus que le montant annuel mondial de l’aide au développement) ; l’indifférence des marines devant la mise à sac du musée de Bagdad (alors que les puits et le ministère du pétrole, eux, étaient « sécurisés ») ; les jeux de cartes aux portraits des dirigeants du régime irakien, comme si la guerre était une partie de rami ; l’invocation obsessionnelle de Dieu par des dirigeants en apparence aussi illuminés que le premier taliban venu ; les témoignages à charge contre l’Amérique des Bush, Cheney et Rumsfeld que sont le film à succès de Michael Moore, Bowling for Columbine, et son dernier ouvrage (10) ; sans parler du calvaire des Palestiniens : autant de faits et d’images qui, entre bien d’autres, choquent profondément les consciences et appellent l’affirmation de valeurs européennes différentes.

Des « dissidents » inconséquents

Le calendrier faisant bien les choses, la logique voudrait que des réponses soient apportées à ces questionnements dans le projet de traité constitutionnel de la Convention pour l’avenir de l’Europe que son président, M. Valéry Giscard d’Estaing, n’a pas renoncé à présenter à la fin juin. On sait déjà que l’idée d’une politique étrangère et de défense commune se décidant à la majorité qualifiée (et garantissant donc par avance, chez les Vingt-Cinq, la sujétion à Washington) s’est désintégrée dans les décombres de Bagdad. On sait aussi, d’après les seize premiers articles rendus publics en février dernier, que le traité entérinera le primat actuel de l’économique et du monétaire sur le social dans la construction communautaire, ne serait-ce qu’en raison de l’absence de toute référence positive aux services publics.

En fait, les gouvernements allemand, belge et français, qui se sont trouvés en pointe dans le refus de la guerre, sont pris dans une terrible contradiction : à quoi bon récuser l’hégémonie géostratégique de Washington si, dans le même temps, les politiques qu’ils mènent dans leur pays et celles qu’ils s’apprêtent à institutionnaliser au niveau européen ne sont que des copies presque conformes du « modèle » ultralibéral anglo-saxon ? Aussi bien les différentes contre-réformes du gouvernement Raffarin (retraites, éducation, droit du travail, fiscalité, protection sociale, etc.) que le laminage de l’« Etat social » préparé par M. Gerhard Schröder (et vivement contesté par la base du Parti social-démocrate, SPD) sont autant de succès pour MM. Aznar, Berlusconi et Blair, qui, eux, sont parfaitement cohérents dans leur libéralo-atlantisme. Il ne faudra donc pas s’étonner si une bonne partie des forces qui, en Europe, se sont mises en mouvement contre l’agression anglo-américaine n’épargnent pas les « dissidents » certes méritoires, mais inconséquents, que sont le chancelier allemand et M. Jacques Chirac.

1) Sous réserve de ratification du traité, seront membres de l’UE à compter du 1er mai 2004 : Chypre, l’Estonie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, Malte, la Pologne, la République tchèque, la Slovaquie et la Slovénie.

(2) Lire « Une Europe de moins en moins européenne », Le Monde diplomatique, janvier 2003, et Anne-Cécile Robert, « L’étrange politique étrangère de l’Union européenne », Le Monde diplomatique, décembre 2002.

(3) John Vinocur, « European detractors fault Bush, but where are the counterexamples ? », International Herald Tribune, Paris, 9 avril 2003.

(4) Zbigniew Brzezinski, Le Grand Echiquier, Hachette, coll. « Pluriel », Paris, 1997.

(5) Defense Policy Guidance 1992-1994, cité dans Philip Golub, « Métamorphoses d’une politique impériale », Le Monde diplomatique, mars 2003.

(6) « Y a-t-il encore une union européenne ? », Le Monde diplomatique, avril 2003.

(7) William Pfaff, « Which country is next on the list ? », International Herald Tribune, 10 avril 2003.

(8) Lire Frédéric F. Clairmont, « Vivre à crédit ou le credo de la première puissance du monde », Le Monde diplomatique, avril 2003. Lire également, dans Politis du 10 avril 2003, le commentaire du rapport « Fin d’empire » d’un institut de recherche britannique, Independent Strategy, qui met à mal le mythe de la surpuissance économique américaine.

(9) « Logique jusqu’au bout », Le Monde, 12 avril 2003.

(10) Michael Moore, Mike contre-attaque ! Bienvenue aux Etats stupides d’Amérique, La Découverte, Paris, 2002.

Sources : http://www.monde-diplomatique.fr/2003/05/CASSEN/10175

 

 

Publié dans LES USA ET L'EUROPE

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