La colère de Dick Cheney en Irak

Publié le par Adriana Evangelizt

La colère de Dick Cheney en Irak

Se rendre en Irak pour exprimer sa colère n’est pas du domaine commun. Le vice-président des États-Unis s’est permis ce luxe. Il est fâché et il entendait bien l’exprimer par l’entremise de son ambassadeur, qui l’accompagne, aux dirigeants irakiens. Comme pour appuyer cette colère d’effet, bien évidemment, sa visite a été marquée par l’explosion d’une roquette dans la Zone verte, à proximité de l’ambassade américaine où il se trouvait en compagnie de plusieurs journalistes.

Dick Cheney est en tournée d’une semaine au Proche-Orient. Il va tenter de stimuler le soutien régional au gouvernement irakien. D’ici le 14 mai prochain, le vice-président doit notamment se rendre aux Émirats arabes unis, en Arabie saoudite, en Égypte et en Jordanie.

Quant à savoir si la sécurité s’était améliorée en Irak depuis sa dernière visite, en décembre 2005, le vice-président a répondu que, d’après ses entretiens avec les responsables irakiens, « ils croient que la situation s’est améliorée ». Manque de chance : alors qu’il poursuit sa seconde visite dans la région de Bagdad, un violent attentat à la voiture piégée a fait au moins 14 morts et près de 90 blessés dans la capitale du Kurdistan irakien, Erbil. De plus, quatre journalistes irakiens ont été tués dans une embuscade près de Kirkouk, au nord de Bagdad. Deux autres personnes ont été tuées par des hommes armés dans la capitale.

L’objet de sa colère ? Monsieur Cheney, tout puissant qu’il puisse paraître, n’a pas encore obtenu gain de cause à sa demande d’annuler les vacances estivales, pour deux mois, des députés irakiens.

Cela irrite au plus haut point Washington, alors que des projets de lois cruciaux sur le pétrole ou la réconciliation doivent être adoptés. Washington souhaite en effet que soient adoptés au plus tôt des articles de loi bien particuliers qui pourraient contribuer à mettre fin aux violences interconfessionnelles : « Je leur ai fait comprendre que nous croyons qu’il est très important de faire avancer les choses dans les plus brefs délais, que tout retard injustifié serait difficile à expliquer, et que nous espérons qu’ils aborderont cette question avec toute la rapidité voulue ».

Ces lois portent notamment sur le partage des revenus pétroliers, l’un des grands litiges entre les minorités sunnites, chiites et kurdes, et sur la réintégration dans la fonction publique irakienne d’anciens membres du parti Baas de Saddam Hussein. « La vérité, c’est qu’avec l’effort majeur que nous faisons, celui que font les forces de sécurité irakiennes, il est impossible de comprendre que le Parlement irakien prenne deux mois de congés cet été  », a déclaré l’ambassadeur américain en Irak Ryan Crocker à des journalistes. La visite impromptue de Dick Cheney en Irak serait une façon de faire encore pression sur Nouri al-Maliki et les responsables irakiens pour qu’ils travaillent davantage sur le front politique pour réconcilier les factions irakiennes.

Selon l’ambassadeur, Dick Cheney devait vraisemblablement répéter le souhait de Washington que le Parlement irakien annule les vacances parlementaires en cette période troublée : « Cela fait clairement partie du message. Je l’ai dit, la secrétaire d’Etat Condoleezza Rice l’a dit. Je suis sûr que le vice-président le dira également  ». Ces critiques américaines ont suscité une riposte cinglante du président du Parlement irakien, Mahmoud al-Machhadani. « Vous feriez mieux d’essayer de contrôler Nancy Pelosi que Mahmoud al-Machhadani  », a-t-il lancé dans une allocution retransmise en direct à la télévision irakienne, dans une allusion à la présidente démocrate de la Chambre des représentants. Les parlementaires irakiens n’ont pas encore décidé de la durée de leurs vacances d’été, mais cette menace américaine sur eux est dénoncée : elle pourrait braquer bon nombre d’entre eux, prêts à renoncer à leurs congés pour marquer leur opposition aux Etats-Unis. Qu’aura gagné ainsi l’Amérique déjà en état de faiblesse et de décomposition avancée aux yeux du monde ?

Monsieur Cheney n’est pas particulièrement chanceux : un sondage USA Today/Gallup démontre ces jours-ci que six Américains sur dix souhaitent un retrait rapide d’Irak. Qui plus est, ils sont de plus en plus pessimistes à l’égard de l’issue de cette guerre : « Americans feel more pessimistic about the war in the wake of Bush’s speech. For the first time, a narrow plurality — 49%-47% — say the United States is likely to lose the war. Before the speech, they said by 50% to 46% that the United States was likely to win ».

La cote de popularité du président américain George W. Bush poursuit inexorablement sa dégringolade avec seulement 28 % d’opinions favorables et cette chute est néfaste pour les républicains prétendants à sa succession, selon un sondage du magazine Newsweek : « Don’t fret, Dubya. Sure, things aren’t going your way. Attorney General Alberto Gonzales does not appear to be the most competent of fellows. The World Bank is about to sack your pal Paul Wolfowitz. Your vice president’s former chief of staff, I. Lewis (Scooter) Libby, is probably going to prison. And this little adventure in Iraq has proven more irksome than you’d imagined. Which is why your average approval rating, according to the good people at Pollster.com, is 34.3 percent. In the latest NEWSWEEK Poll, in fact, America has awarded you the lowest individual presidential approval rating since the malaisey days of Jimmy Carter : 28 percent  ».

De tels résultats doivent rendre plutôt inconfortable la tournée du vice-président au Proche-Orient. Surtout lorsqu’il est question d’accroître la participation régionale dans l’effort de paix de l’Irak.

Sources Cent Papiers

Posté par Adriana Evangelizt

Publié dans CHENEY-RUMSFELD

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